Le destin de Marcols les Eaux a toujours été lié à celui de son voisin albonais puisque, depuis leur origine et jusqu’en 1912, les deux villages n’en faisaient qu’un.
Marcovolos, nom donné par la légion romaine qui en occupait jadis les hauteurs (le rocher de Don en particulier), était l’un des villages de la vallée de la Glueyre traversés par ceux qui, depuis la vallée du Rhône, voulaient se rendre au Puy ou à la Chaise Dieu. Au XIème siècle, ledit Seigneur de Don (famille de la Roche en Régnier) fit construire une fortification sur ce même rocher de Don pour que sa garnison assure la protection et le contrôle de cette partie haute de la vallée de la Glueyre (il ne reste de cette bâtisse qu’un amas de pierres et quelques pans de murs). Il décida aussi d’ériger une église dévouée à l’évêché de la Chaise Dieu dont Marcovolos faisait alors partie et dédiée à Saint Julien. Puis il céda, tout autour d’elle, un ensemble de terrains destinés à l’agriculture, à la production de vin en particulier. Des moines s’y installèrent et y établir un prieuré d’une manière telle qu’il était visible des deux bourgs principaux (Albon et Marcovolos). C’est ainsi que l’ensemble du village prit le nom de Saint Julien d’Ursival. De cette époque, seules les terrasses utilisées pour la culture de la vigne encore visibles subsistent autour des piliers du prieuré perdus au milieu de la végétation. Car, si la guerre de 100 ans (1337/1453) et les épidémies avaient décimé les populations (on ne recensait alors plus que 64 habitants), les guerres de religion firent le reste à la fin du XVIème siècle et le prieuré fut l’objet de toutes les « attentions ». Démoli partiellement puis reconstruit, il fut détruit « pour de bon » par les réformés qui s’étaient réfugiés en nombre dans les Cévennes. Un temple vit alors le jour au centre du bourg de Marcols …que les catholiques s’empressèrent de démolir dès qu’ils eurent repris le dessus. En 1688, ces derniers dressèrent tout naturellement en lieu et place … une église. Cette dernière parviendra à survivre au temps et demeure aujourd’hui le lieu de culte de tous les catholiques et le symbole de toutes ces luttes intestines qui marquent l’histoire de la France. Elle vient de prendre un bain de jouvence avec tout dernièrement la réfection de son toit.
En 1790, Révolution oblige, la commune prit le nom de Marcols. Même si l’ambiance entre catholiques et protestants n’était pas toujours conviviale (combien d’amours impossibles, de mariages brisés ?), la vie économique avait repris ses droits. En effet, le village profitait de sa proximité de cours d’eau, la Glueyre principalement, pour voir proliférer des usines de moulinage de la soie. Marcols en comptait une quinzaine ce qui demandait une importante main d’œuvre, le plus souvent les filles des fermes environnantes. De nombreux corps de métiers (menuisier, forgeron, etc) gravitaient autour. Des tanneries et des teintureries s’installèrent aussi. L’agriculture, grâce à la terre volcanique, était florissante. De plus on trouvait dans les eaux minérales des vertus inestimables que les curistes voulaient absolument s’appropriaient. Le commerce, l’hôtellerie en particulier, battait son plein. Bref Marcols contribuait à la fin du XIXème siècle avec l’ensemble de ses activités à faire de l’Ardèche l’un des premiers départements industriels de France. En 1911, Marcols pouvait s’appuyer sur une population de 1791 habitants.
Mais en 1912, Marcols se scinde en 2 parties. La partie basse, majoritairement protestante, devient, sous l’influence de la dizaine des riches mouliniers qui dirigeait l’activité économique locale, la commune d’Albon d’Ardèche, d’une superficie de 900 hectares soit le tiers de celle de Marcols. La partie haute, majoritairement catholique, ajouta à Marcols la pertinence de ses eaux minérales pour devenir Marcols les Eaux. De plus, la guerre de 1914/1918 entraîna le déclin des communes rurales qui payèrent principalement un large tribut aux combats puisqu’ils décimèrent plus du quart de leurs 18/25 ans. Ainsi, en 1921, le village ne comptait plus que 823 habitants. Ensuite, l’apport de la soie artificielle (ou viscose), puis synthétique, meilleur marché, eut peu à peu raison de la soie traditionnelle et les moulinages fermèrent progressivement les uns après les autres. La mauvaise viabilité des fermes poussèrent les paysans à s’exiler vers les villes de la vallée du Rhône, Lyon en particulier. La dernière liaison routière par car, depuis Valence, s’interrompit en 1968.
Notre commune eut cependant la chance de posséder en son sein une riche et généreuse habitante, Madame Camous Salomon, qui lui donna une forte somme d’argent pour la construction d’un hôpital en faveur, disait-elle, des miséreux de son village et des imprévoyants qui pensent que jeunesse dure toujours. Inauguré en 1934, il mettra au monde son dernier enfant en 1961 et il deviendra le 1er janvier 1993 uniquement une maison de Retraite médicalisée. Elle maintient depuis les emplois nécessaires à ce secteur d’activité et donc la vie pour Marcols les Eaux mais aussi pour les villages (Albon, Mézilhac, etc) environnants. Totalement reconstruite dans les normes réglementaires actuelles, elle emploie aujourd’hui, durablement, 90 personnes. Si on ajoute qu’en 1970 la faible rentabilité de nos eaux minérales eut raison de ses vertus ancestrales et de son dernier exploitant, la famille Merland, et que l’ultime moulinage, celui de l’usine de Labrot, propriété de Thérèse et Robert Courtier, cessa officiellement toute production en 1992, on comprend très bien aujourd’hui notre dépendance à ce secteur d’activité.
Mais, entre temps, il y avait eu la 2ème guerre mondiale qui paralysa le pays pendant plus de six ans et tua bon nombre de ses habitants. Elle fut marquée par l’attitude exemplaire d’une de nos concitoyennes, Melle Marie Giraud. Profondément engagée dans sa paroisse protestante, d’une grande rigueur morale, elle n’hésita pas à cacher chez elle des juifs et à héberger quelques temps le sergent John Brough, seul survivant d’un avion de la RAF qui effectuait une mission de parachutage et qui s’était écrasé, le 04 novembre 1943, sur le rocher de Bourboulas situé sur les hauteurs de la commune. En 1945, reconnaissance suprême, elle accéda au poste de première magistrate de Marcols les Eaux. Elle fut la première femme à occuper une telle fonction en Ardèche et probablement une des toutes premières en France. Une place porte aujourd’hui son nom. Elle est située en face de son lieu d’habitation, son usine de moulinage de « la Neuve » qu’elle préserva de son démantèlement et qui est inscrite depuis au patrimoine industriel ardéchois.
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